Vu au cinéma « Philomena », le nouveau film que Stephen Frears a concocté à partir d’une histoire vraie: En 1952, Philomena Lee, adolescente irlandaise, tombe enceinte. Rejetée par sa famille, elle est internée dans un couvent dont les religieuses, en compensation des soins qu’elles prodiguent à son fils Anthony, l’emploient aux tâches les plus viles. Elles ne l’autorisent à voir l’enfant qu’une heure par jour, jusqu’au moment où, à l’âge de trois ans, il lui est définitivement arraché pour être « vendu » à un couple d’Américains.
Après avoir essayé durant des années de le retrouver, Philomena s’est renfermée sur son secret, qu’elle n’a levé que cinquante ans après les faits, se confiant d’abord à sa fille, puis à Martin Sixmith, un journaliste désabusé que celle-ci a rencontré par hasard. Ce dernier persuade la vieille dame de l’accompagner aux États-Unis à la recherche d’Anthony.
Stephen Frears et son scénariste Steve Coogan (qui joue également le rôle de Martin) se sont laissé guider par l’émotion qui se dégage de cette histoire. Sans refuser les accents mélodramatiques, le film parvient à s’en distancer par un humour omniprésent, jouant du contraste entre Philomena (modeste vieille dame catholique, affaiblie mais volontaire, terre-à-terre mais imprégnée de romans à l’eau-de-rose), et Martin (journaliste subtil et raffiné, formé à Oxford mais qu’un passage par l’establishment a rendu totalement désabusé).
L’autre force du film, c’est la grande actrice shakespearienne Judi Dench, qui parvient à investir de manière saisissante le personnage de Philomena. Grâce à son interprète, celle-ci apparaît comme la véritable locomotive du film. D’abord parce qu’elle est capable tour à tour de nous émouvoir, de nous surprendre et de nous amuser. Mais aussi parce que son apparente faiblesse (petit bout de femme démunie, vieille et ridée, malmenée par la vie) est transcendée par une formidable détermination.
Copyright Khaled Osman (janvier 2014)