La résignation ne sied guère…

Lu dans la revue Akhbar el-Adab, sous le titre « Dossier spécial consacré à la vie au Paradis », l’hommage dédié à la mémoire de Gamal Ghitany par l’écrivain Yasser ‘Abdelhafez (extrait traduit de l’arabe par mes soins):

«  »Comme partent les vivants, il est parti… »
Tels sont les premiers mots qui me sont venus à l’esprit en apprenant la disparition de Gamal Ghitany.

Ce vers [dû au poète ‘Abdelmon’eim ‘Awwad] m’a accompagné tout au long de cette journée, à mesure que la nouvelle se confirmait, via les communiqués officiels, les mots endeuillés de ses amis sur les réseaux sociaux, et enfin les images du cercueil emportant sa dépouille.

Il s’est donc résigné à perdre ce dernier combat qui s’est prolongé près de deux mois durant, lui qui auparavant n’avait jamais perdu la moindre bataille, aussi féroce fût-elle. La résignation ne sied guère à cet homme qui s’est toujours montré victorieux et plein de vitalité.
C’est pourquoi, au moment où passait devant moi ce cercueil qui n’est pas son genre, j’ai aperçu son sourire – ce sourire que vous aimiez sans toujours percevoir ce qu’il recouvrait. Se moquait-il de vous parce que vous ne compreniez pas? Oui, bien sûr, c’est la seule explication conforme à la logique et à sa personnalité.

Il n’est pas revenu de là-bas parce qu’il a trouvé, sur l’autre rive, des tentations assez grandes pour l’inciter à rester.

Peut-être a-t-il rencontré là-bas l’un de ceux – et comme ils sont nombreux! – qu’il aimait et admirait. Naguib Mahfouz était vraisemblablement aux avant-postes des gens venus l’accueillir, n’hésitant pas pour l’occasion à sacrifier sa routine quotidienne (routine qu’il s’était sans nul doute recréée là-bas).
Ghitany pouvait-il manquer une telle rencontre pour retourner dans le monde des vivants? Je ne le pense pas.

Peut-être aussi a-t-il croisé quelqu’un qui avait les réponses aux questions qu’il s’était toujours posées. Qui donc pouvait lui révéler la clef du temps, afin qu’il comprenne enfin « où hier est parti », cette énigme qui l’avait toujours obsédé?

Qu’a-t-il trouvé encore sur l’autre rive, de ces choses qu’ils appréciait au point de convoiter si peu les possessions terrestres? »

Copyright Khaled Osman (octobre 2015)

 

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