La Marcheuse

Roman de Samar Yazbek,  traduit de l'arabe (Syrie) par Khaled Osman


Qui se soucie encore en France du peuple syrien?

Dans ce roman, paru en 2017 en exil (Samar Yazbek est réfugiée en France depuis 2011), le personnage principal symbolise l'abandon dont ce peuple fait l'objet. Cette jeune fille, qui a la double particularité depuis son plus jeune âge d'être muette et de ne pouvoir rester en place, est la narratrice improbable du livre.

Sa naïveté et son sens poétique (c'est une obsédée des couleurs) donnent à ce récit une dynamique très particulière, faite de découvertes prosaïques et de souvenirs littéraires (elle a fait son auto-éducation avec la bibliothécaire férue de peinture, et notamment de Marc Chagall, de l'école où sa mère était femme de ménage, et elle est fan du "Petit Prince" et de ses dessins qu'elle a appris à reproduire avant de se lancer dans ses propres créations).
De fil en aiguille, elle se retrouve progressivement seule dans la cave d'un immeuble bombardé de la Ghouta, cette banlieue rebelle à l'Est de Damas, dont la chute fut l'un des derniers actes de la révolte armée contre le régime.

Significativement, ce roman est dédié "A Razane Zaytouna, en son amère absence..."

Il se termine, tout aussi significativement par ces mots : "j'ai envie de crier..." Restons attentifs au cri silencieux du peuple syrien.


Lecture de Henri Lourdou sur son blog, octobre 2020
    


Dans ce roman atypique, la narratrice nous dit ne pas pouvoir s'arrêter de marcher, marcher sans arrêt, et c'est pourquoi sa mère l'attache, avec une corde. Mais durant tout le roman, elle ne marche finalement que peu. Elle ne marche, libre de toute attache, que pour quitter ce check-point, ce qui coûtera la vie à sa mère. Elle reste attachée tout le reste du temps. Enfermée dans des refuges, avec d'autres gens, ou seule, dans un souterrain sombre. Allongée sur un lit d'hôpital, blessée. A aucun moment elle n'est libre, sinon dans sa tête. Dans sa tête, elle qui est muette, elle parle, elle divague, elle délire, elle dessine, elle colore. On voit la guerre à travers ses mots, ses couleurs, ses dessins. Ses mots sont son souffle, son pouls, la pulsation qui la relie à la vie, la cordelette qui nous mène à son monde. C'est un roman très dur, mais plein de beauté, de poésie, de merveilleux. C'est un acte de résistance.

Lecture de Pseudoc sur le site Babelio, novembre 2019



Un livre dont je ne saurais vraiment dire s'il m'a plu ou pas
. La marcheuse est l'histoire d'une jeune fille syrienne, Rima, dont la tête se situe dans les pieds, qui est « atteinte de bougeotte ». Attachée par une corde au poignet de sa mère ou de son frère, au barreau du lit ou à tout autre meuble, elle vit entravée de peur que ses pas ne la portent sans fin au bout du monde. Aphasique à la suite d'un épisode traumatique, la narratrice s'adresse au lecteur pour lui conter la richesse de son monde intérieur, sa passion pour les couleurs et le dessin, son goût pour les belles histoires. Rima ne parle pas, son mode d'expression c'est l'art, chaque lettre d'alphabet est figurée par un animal et c'est tout un monde en images qu'elle propose aux personnes qui l'entourent.

Mais la jeune fille vit dans un pays en guerre, dans un chaos absolu et, au cours d'un voyage en bus, sa vie bascule. Nous la suivons dans une course folle pour échapper aux massacres, aux attaques chimiques, à la faim et à la soif. C'est éprouvant, on est plongé au coeur d'un conflit auquel la narratrice elle-même ne comprend rien, confrontée à la folie d'hommes qui s'entretuent, sans compassion aucune même pas pour les enfants.

C'est dur, âpre, sans espoir et à la fois très poétique. Rima est un personnage attachant, qui incarne la différence – son handicap est abordé avec finesse et l'ouvre à d'autres modes de communication – et l'absurdité d'un conflit sans fin. On achève le livre avec soulagement.

Lecture de Cécile StMartin sur le site Babelio, juillet 2019

Ce roman est bouleversant, terrible. La guerre est souvent un sujet difficile à lire. Ici, il s'agit de la vie d'une adolescente retenue prisonnière, avec des épreuves horribles.

Malgré l'intensité du roman, je n'ai pas été conquise. Il y a beaucoup de retours en arrière dans son histoire, il faut être vraiment concentré sur cette lecture.
le style d'écriture n'est pas celui que j'apprécie, car la narratrice s'adresse directement à moi en tant que lectrice. L'auteure nous oblige par ce biais d'être presque dans la tête de cette adolescente perturbée par la guerre qui se déroule dans son pays.
Enfin, le final de cette histoire manque, je trouve. Que devient Rima ? Est-elle sauvée ? Succombe t-elle