Femme interdite
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Ali Al Muqri fait le portrait d’une société hypocrite à travers le récit d’une femme défendue, écartelée entre sexe et religion. Une ode joyeusement amorale au désir féminin. Dans le secret de sa chambre, une "femme-défendue" se regarde dans le miroir. Son corps d’une beauté insolente, soustrait au regard des hommes depuis ses 8 ans, est tout entier tendu vers le désir. Depuis que sa sœur aînée l’a initiée à la sexualité en lui faisant écouter des « cassettes culturelles », du porno local sur bandes audio, elle n’a qu’une idée en tête : perdre sa virginité et « goûter au charivari ». Schéhérazade moderne, elle fait le récit de cette quête impérieuse en dialoguant avec un poème d’Ahmad Chawqi, interprété par Oum Kalsoum. La chanson peut s’entendre de deux manières : l’amour de Dieu ou l’amour charnel. Écartelée entre sexe et religion, entre une sœur délurée et un frère passé du communisme à l’islamisme radical, la narratrice épouse finalement un bigot impuissant. "La créature féminine est femme-défendue avant de naître, elle le reste toute sa vie durant, et aussi après sa mort", martèle la jurisprudence islamique importée d’Arabie saoudite enseignée à l’université. Au Yémen, comme dans les autres pays régis par l’islam politique, le corps des femmes est une obsession et la frustration un carburant puissant. Les religieux l’ont bien compris en envoyant les jeunes gens faire le djihad pour sublimer leurs pulsions sexuelles. C’est ce qui va arriver à la narratrice, envoyée en Afghanistan lestée d’armes et d’argent pour soutenir les combattants d’al-Qaida. Au terme d’un périple épique via l’Arabie saoudite, le Soudan, l’Iran, l’Égypte et le Pakistan, au cours duquel elle rencontre une Indienne bouddhiste convertie à l’islam et une journaliste américaine enfermée dans un cachot iranien, elle est témoin de viols et se rend compte que la véritable épouse de son mari, bigame, est "la mort en martyr pour l’amour de Dieu". Le destin de cette femme comme une métaphore de l’écrivain Construit en deux temps, ce roman d’apprentissage est à la fois une initiation sexuelle en terre d’islam et une incroyable plongée dans le quotidien des femmes enrôlées dans le djihad. Fable politique, drôle et crue, Femme interdite n’est pas un roman réaliste. Nourri de poésie et de philosophie, citant Bourdieu et Lénine, Ali Al Muqri donne le pouvoir aux femmes. Dans une société hypocrite et verrouillée, où le contraste entre la modernité technologique et l’archaïsme du discours religieux est saisissant, les stratégies de contournement déployées sont réjouissantes. Loula, la sœur délurée, fait commerce de son corps et rapporte d’un improbable voyage à Paris le récit de ses frasques avec un peintre rencontré au Louvre, pour qui, ultime transgression, elle a posé nue. Noura, sa belle-sœur, répudie son mari après avoir découvert qu’il la filmait à son insu pour faire des vidéos pornographiques. Les scènes torrides entre jeunes filles, qui enregistrent leur journal intime sur cassettes, semblent tout droit sorties de la Philosophie dans le boudoir du divin marquis. Alors que le Beau Juif, best-seller dans le monde arabe, contournait la censure en transposant une histoire d’amour empêché dans le Yémen du XVIIe siècle, Femme interdite assume la frontalité. Le roman porte une charge subversive, explosive, qu’on lit rarement dans la littérature arabe contemporaine. On peut interpréter le destin de cette femme comme une métaphore de l’écrivain yéménite, brûlant de désir, mais constamment surveillé par la société et les rapports qui visent journalistes et intellectuels. À l’instar de la "femme-défendue", il n’a d’autre choix, pour être libre de vivre et d’écrire, que l’exil et le dépouillement. Sophie Joubert, L'HUMANITE, décembre 2016 |
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L’imam Izzat Al-Attiyah et son collègue d'Al-Azhar Abd El-Mahdi Abd El-Kader ont emballé les réseaux sociaux avec une fatwa qui recommanderait aux femmes, pour ne plus avoir à porter un voile lorsqu’elles partagent seule à seul un espace de travail avec un collègue masculin, d’allaiter cinq fois ledit collègue. Cinq anodines tétées et tombe le voile! Explication: donner le sein "est considéré comme un acte maternel qui empêcherait tout acte sexuel". Ben voyons! Exit après ça le désir lubrique des obsédés prédateurs à moustache (le port du voile l’insinue), impuissants ou éjaculateurs précoces (Ali al-Muqri l’affirme). Cette pacifique fatwa illustre un propos de Femme interdite qui dénonce les stupidités auxquelles conduit une organisation sociale régie par une obsession : "Les femmes sont des goules, ce sont elles qui séduisent les hommes. Sans elles, ils seraient la pureté même." De sorte qu’il faut, dès l’âge de neuf ans, dissimuler les corps, des pieds à la tête, couper le son – "la voix de la femme est indécence" –, traquer l’équivoque – jusqu’aux prénoms – qui pourrait exciter le désir de nos gugusses. "Femme-défendue", "interdite"! Mais, pour devoir déserter les corps, le sexe n’en occupe pas moins tous les esprits, de sorte que, en ces temps de formalisme et de bigoterie, les "principes droits de l’islam" condamnent l’abstème à ingurgiter de drôles de bibines. Comme cette fatwa suscitée, resucée par Ali al-Muqri pour l’habitacle d’un taxi. Comme ces cours sur le licite et l’illicite en matière de "conjonction" prodigués par écran interposé: pour ne pas être en présence physique de ses étudiantes, le professeur n’en est pas moins émoustillé par sa suggestive leçon. En poussant la logique à son extrême, en utilisant l’ironie comme méthode de dévoilement, Ali al-Muqri montre les aberrations d’une codification des comportements reposant sur une séparation formaliste, sans âme, entre licite et illicite, halal et haram. Sauf qu’ici ce n’est pas pile ou face mais plutôt: "pile je gagne, face tu perds" ! Tant les règles sont absurdes et le jeu cruel. Femme interdite raconte l’éducation sentimentale ou plutôt sexuelle contrariée d’une jeune Yéménite. Ses aînés, Loula, la sœur, et Raqib, le frère, contestent l’ordre ambiant : libération par le vagin pour l’une, par le marxisme pour l’autre. Loula et Raqib morigènent leur cadette. Via des « cassettes culturelles » où des hommes et des femmes s’adonnent au "charivari" (en un mot du porno) pour l’une, via Rosa Luxemburg pour l’autre. Si Loula se montre constante, son marxiste de frère, après avoir convolé, ira fricoter du côté du salafisme. L’égarement individuel comme miroir des impasses du collectif. La cadette, victime d’une injonction paradoxale, poursuit un rigoureux cursus théologico-scolaire tout en restant excitée par les "cassettes culturelles, travaillée par de puissantes pulsions sexuelles qui jamais ne seront satisfaites! "Comment trouver la paix intérieure quand on est consumé par les feux du désir, par son volcan qui ne connaît pas de rémission ?" demande la jeune femme. Elle finira par rechercher la « paix intérieure » chez ce voisin qui lui a offert un enregistrement de la chanson "Questionnez mon cœur" (Salou qalbi) d’Oum Kalthoum. Le poème, communément perçu comme religieux, sert de trame au roman qui laisse alors deviner un tout autre sens. Femme interdite est un roman (et une langue) drôle, érotique, savant ; une sociologie, brutale parfois mais efficace, sur les aspirations et les tentatives de la fratrie pour s’extraire de ce cercle meurtrier du halal et du haram, du pile ou face. Le frangin délaissera les frérots pour explorer une autre route. Quant aux deux sœurs... Mustapha HARZOUNE, Hommes et Migrations n° 1311, 2015 |
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Le Prix de la littérature arabe 2015
au Saoudien Alwan et au Yéménite al-Muqri (Outre son Prix attribé à Mohammed Hasan Elwan pour Le Castor, traduit de l'arabe par Stéphanie Dujols), le jury du Prix (de la littérature arabe) a également décerné une Mention spéciale à Ali al-Muqri pour son roman Femme interdite, traduit de l’arabe par Khaled Osman et paru aux éditions Liana Levi. Né en 1966 au Yémén, Ali al-Muqri est romancier et journaliste, chroniqueur dans plusieurs journaux progressistes depuis 1985. Ses engagements et la forte charge sociale de ses livres, traduits notamment en anglais, en espagnol, en allemand et en français, lui ont valu de recevoir des menaces de mort. Auteur d’un essai sur l’alcool et l’islam, sensibilisé à la cause des minorités sociales et religieuses, il s'est surtout fait connaître avec ses deux premiers romans : le premier, intitulé en français Goût noir, odeur noire, a été retenu en 2009 dans la sélection finale du Prix international du Roman arabe ; le second, intitulé Le beau juif, été sélectionné pour le même prix en 2011. Le roman donne la parole à une jeune femme du Yémen, présenté comme un pays rigoriste où règne la charia. Cadette d’une famille modeste, entourée d’une sœur aînée, Loula, "une parfaite dévergondée" aux multiples aventures sexuelles, et d’un frère, Raqib, d’abord marxiste et rebelle avant de se transformer après son mariage en intégriste religieux, la narratrice peine à trouver sa place dans un milieu traditionnel où la femme est victime d’une oppression constante qui l’oblige à bien des hypocrisies. La narratrice finira par épouser l’ami de son frère qui l’emmènera mener le jihad en Afghanistan – une aventure qui virera au grotesque. Ali al-Murqi décrit avec intensité le parcours de cette femme étouffée et aborde de manière frontale les questions de la sexualité et de l’oppression du désir. Ce faisant, il dénonce les violences infligées aux femmes et les souffrances qui en découlent dans un pays où les intégristes procèdent à un véritable viol mental, condamnant les femmes à vivre en marge de la société, réduites à des objets sexuels et soumises à la domination masculine. À travers son récit, l’auteur brosse un portrait sombre d’une société obscurantiste où "éduquer, ça voulait dire frapper". Il raconte sans réserve ni pudeur la vie intime des femmes et leurs frustrations, tout en raillant l’hypocrisie de la société masculine yéménite qui, par le biais de la religion, asservit les femmes et légitime la violence. Un roman audacieux, au rythme rapide et nerveux, qui, bien qu’il se réfère à l’actualité yéménite, fustige des atrocités qu’on rencontre encore dans toutes les sociétés arabes… Ce qui réunit ces deux romans, écrits par deux auteurs issus de pays en guerre – preuve que la littérature dépasse les clivages et la haine –, c’est leur liberté de ton, c’est le regard critique de leurs auteurs à l’égard d’une société arabe qui n’évolue pas, c’est enfin ce ton satirique cher à el-Jahiz et à Voltaire, permettant de mieux dénoncer les tabous et de mettre en avant l’absurdité de certaines situations dictées par l’obscurantisme et la tradition. Cette tendance à aborder les problèmes sociaux sans langue de bois par le biais de l’humour, de la fantaisie, du conte ou des paraboles, est l’une des caractéristiques majeures de la littérature arabe contemporaine. En primant deux auteurs courageux qui s’inscrivent dans cette mouvance, le Prix de Littérature arabe prend acte de ce courant et lui rend un bel hommage. Alexandre NAJJAR, l'Orient Littéraire, octobre 2015 |
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"Il n'est pas permis..."
Dans
un pays où l'on pratique la charia islamique, comme au Yémen, la femme
n'a pas le droit d'écouter de la musique, doit porter le voile dès huit
ans, peut-être mariée dès neuf ans, se soumet à l'oppression sexuelle
et à la domination masculines, n'existe plus en tant qu'être humain,
annihilée dans toute tentative de féminité.
"La voix de la femme est indécence, il ne lui est pas licite de la faire entendre, pas plus que d'exhiber son visage". La femme qui témoigne se souvient de sa jeunesse, raconte son adolescence entourée d'une sœur aînée, Loula, dont les aventures sexuelles effrénées et multiples, attisent son désir, d'un frère, Raqib, d'abord marxiste et rebelle avant de se transformer en intégriste religieux après son mariage, d'un père sévère et d'une mère faible et soumise, craintive. A travers son récit, se dessine une société machiste et liberticide où l'interprétation de l'Islam réduit les femmes à des objets sexuels. "Eduquer, ça voulait dire frapper". De l'école primaire où l'éducation des jeunes filles se règle à coups de trombes d'eau au lycée islamique où la surveillante, munie d'une baguette, contrôle les tenues jusqu'aux chaussures, interdit de rire, puis à l'université islamique où les cheiks dispensent les cours à travers un écran de diffusion interne sans révéler leur visage ; les jeunes femmes "interdites" transgressent dès qu'elles le peuvent la charia qui façonne ainsi leur vie. Les vidéos culturelles (pornographiques en fait) échangées sous l'abaya, les enregistrements audio de sa sœur sur ses multiples aventures initient la narratrice au charivari et autres plaisirs sexuels jusqu'à son mariage avec un ami de son frère très religieux, Abou 'Abdallah avec qui elle se sent prête désormais à vivre elle-même cette intimité conjugale. Une nuit de noces inattendue va l'éloigner de l'université, la condamner à rester chez elle à écouter des cassettes du Coran, des leçons de religion sur les devoirs de la femme musulmane. "Tout ce qui me restait à faire, je l'ai compris ce jour-là, c'était de me taire, d'écouter et d'obéir." L'entraîner ensuite jusqu'en Afghanistan pour s'engager dans le Djihad. Ce roman, porté par un rythme rapide, absolument tragique dans la description du sort réservé aux femmes dans ce pays, secoue le lecteur, si peu préparé à pénétrer dans cette société obscurantiste par le biais de la sexualité. Sans pudeur, avec le risque de choquer (en tout cas de surprendre) Ali Al-Muqri raconte l'intimité des femmes, leurs désirs, fantasmes et frustrations et les interprétations paradoxales de l'Islam en matière de sexe, tantôt prudes, tantôt extrêmement érotiques, presque scabreuses. Le regard peu flatteur, ridicule même et plutôt cynique qu'il porte sur la population masculine, vide de toute intelligence, à travers notamment le père de la narratrice, son frère, son mari, les différents amants de sa sœur ou même les professeurs d'université, les condamnent d'emblée, vire au grotesque et à la caricature, dénonce, certes avec courage l'hypocrisie d'une société yéménite mâle qui, sous couvert de la religion, asservit les femmes, légitime la violence intime mais au final, ce regard laisse le lecteur plus mal à l'aise que révolté. Ce livre, assurément proche d'une réalité ne convainc pourtant pas de bout en bout. La transformation de la jeune fille, éprise de liberté puis missionnée pour détecter dans la presse tous les écrits contraires à la religion, stimulée ensuite par le désir de combat, semble si hâtive, construite sur trop peu de détails, qu'elle ne permet pas au lecteur d'adhérer complètement au récit. Il reste en retrait, perplexe, en quête de précisions et d'éléments qui ne viendront jamais. Evasif également dans la description des personnages secondaires, le récit perd de sa force et de sa profondeur, de sa sincérité même et le lecteur ne sait plus exactement quel est l'objectif de l'auteur: dénonciation de l'intégrisme religieux, éveil des consciences, ou simple brûlot démagogique? Questionnez votre cœur alors mais surtout, à l'instar de l'héroïne, écoutez sans hésiter Oumm Kalsoum. Cécile Pellerin, sur le site ACTUALITTE, avril 2015 |
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Charivari
à Sanaa
Les confessions d'une femme étouffée par le carcan de la tradition Même avant dè sombrer dans le chaos déstabilisé par le terrorisme islamiste, le Yémen était un pays rigoriste, en particulier en ce qui concerne les femmes, et leur tenue 'abaya, burqa, khimar, lathma, niqab, autant de voiles, de voilettes, voire de grillages, pieces du carcan noir imposé aux femmes par les hommes, sous prétexte de préserver leur pudeur, et ce dès leur plus jeune âge. Quitte à se livrer, eux, dans l'intimite, aux pires débauches. Cette servitude, la narratrice de Femme interdite, dont le roman est presenté comme la "confession", l'a subie dès l'âge de 8 ans, de la part de son père Chez eux, ni télé ni magnétoscope. Certes, on l'envoie à l'école, mais dans un lycée islamique, puis à l'université où elle étudiera surtout la religion Sa situation la choque d'autant qu'elle est injuste Raqib, son frère aîné, qui se revendique communiste, boit de l'alcool, blasphème et introduit des livres "interdits" au foyer. Tout du moins jusqu'à ce qu'il se marie, et devienne un tyran fanatique, un cheikh prêcheur, qui partira faire le dilliad en Tchétchénie Et sa soeur cadette, Loula, la chouchoute du père, est, elle, une parfaite dévergondée, qui jouit de l'impunité parce qu'elle nourrit la famille avec des gains acquis de façon peu orthodoxe, si l'on ose dire. Travaillant dans l'import-export, elle voyage beaucoup, s'offre à son patron, pose nue pour un peintre parisien. Et visionne en cachette, avec sa soeur, sur son portable des scènes de "charivari", ou des "films culturels", bel euphémisme pour pornos.[...] Journaliste progressiste, essayiste, auteur du Beau juif, que l'on avait apprécié (Liana Levi, 2011), Ali al-Muqri nous offre ici un roman tantôt étouffant comme sous la burqa, tantôt plein d'humour grinçant, triste état de son pays, juste avant la guerre larvée qu'il subit aujourd'hui. Jean-Claude Perrier, LIVRES-HEBDO, février 2015 |
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Ali al-Muqri
et l'oppression religieuse au Yémen Chaque mois, Lire donne la parole à un écrivain pour qu'il nous ouvre les portes de sa réalité. Ce mois-ci : Ali al-Muqri, romancier yéménite déjà nommé pour l'Arab Booker Prize avec Le Beau Juif. Dans Femme interdite, cet intellectuel maintes fois menacé dénonce le sort fait aux femmes de son pays, soumises au joug des traditions et de la religion. Et, avec elles, l'hypocrisie d'une sociètè en proie au doute et à la frustration. Extrait des propos de l'auteur, recueillis par Julien Bisson: "J'ai voulu centrer mon roman Femme interdite sur l'expérience des femmes yemenites, dont les conditions de vie sont aujourd'hui très pénibles Les femmes dans le monde arabe sont condamnées à vivre à la marge, même quand elles font le choix difficile de rejoindre le djihad ou al-Qaida. Mais cette domination masculine a un revers: l'oppression sexuelle qui tente de réprimer toute forme de désir et finit par alimenter les frustrations du pays. C'est pourquoi la question sexuelle est aussi au coeur du roman car elle nous dit quelque chose de la souffrance faite aux femmes mais aussi aux hommes. Et soit dit en passant, cette association de fait entre repression sexuelle et extrémisme religieux n'est pas propre aux seules societes arabes - on la retrouve aussi dans les cultures juive, chrétienne ou hindoue. La particularité du Yemen, c'est l'existence de la charia. Mais il faut bien comprendre que son application est toujours sujette aux retournements politiques. C'est un instrument du pouvoir. Et aujourd'hui, il y a une alliance entre les autorités et "le cierge", pour maintenir à la fois le pouvoir en place et la stabilité religieuse. C'est ce qui explique ici l'absence totale de Lumières intellectuelles ou de projets démocratiques, via l'éducation ou les medias - car ils ne sont d'aucune utilité pour le pouvoir ou le cierge." LIRE, février 2015 |